La plasticité cérébrale et la déficience auditive

Marshall Chasin
June 4, 2013

Republished from the August 2007 issue of Listen/Ecoute, with kind permission of the Canadian Hard of Hearing Association.

Par Marilyn Dahl

Je suis malentendante, donc j’entends plus lentement.» Ce sont les mots que Margaret Brown, présidente du secteur de Chilliwack, utilise pour expliquer sa difficulté auditive à autrui. J’ai adopté

cette formule pour mon propre usage et elle semble efficace pour faire parler les interlocuteurs plus lentement et distinctement. Un semblant de compréhension naît dans leurs yeux. La recherche scientifique a démontré que les personnes malentendantes entendent effectivement plus lentement – il y a un léger retard dans le traitement et la compréhension du langage parlé. Le phénomène s’applique à tous les âges et est important dans le cadre éducationnel où la déficience auditive, combinée aux effets négatifs du bruit en salle de cours, désavantage l’étudiant malentendant.

Je définis la « recherche » comme un processus scientifique qui confirme quelque chose que le « bon sens » connaît déjà. Il est utile d’établir et de publier ces conclusions de la recherche. La recherche permet d’établir la crédibilité et un dossier écrit des problèmes associés à l’adaptation à une déficience auditive et de proposer des solutions. Parfois, la recherche stimule également l’imagination du public et des professionnels et conduit à la création de programmes et de politiques qui profitent à tous.

Au cours des dernières décennies, une découverte révolutionnaire en neuroscience a suscité un grand enthousiasme, c’est-à-dire que le cerveau, plutôt que d’être « câblé » comme un ordinateur, peut effectivement changer sa propre structure et sa fonction. Cette adaptation est possible même à un âge avancé. L’acceptation de ce concept a abouti, dans divers cas, à la rééducation de victimes d’attaque, à la vision d’aveugles, à l’élimination de certaines difficultés d’apprentissage, et des enfants avec des troubles moteurs cérébraux ont appris à bouger plus souplement. Cette découverte a conduit à des exercices cérébraux qui rebranchent le cerveau et réduisent les déficiences mentales, éliminent la douleur chronique, régénèrent les cerveaux vieillissants et guérissent la dépression réfractaire. Le cerveau se modifie réellement lui-même. Le livre du Dr. Norman Doidge, The Brain that Changes Itself rend compte de nombreuses histoires personnelles de ce genre de triomphe sur les trauma- La plasticité cérébrale et la déficience auditive tismes et la déficience.

Le concept est appelé « plasticité cérébrale » et a inspiré l’invention de l’implant cochléaire. Nous, qui avons une déficience auditive, quelle soit congénitale, contractée en bas âge ou à l’âge adulte, connaissons l’importance et l’efficacité des exercices d’éducation et de rééducation auditives. Le bon sens et l’expérience nous les ont appris. Les groupes de personnes malentendantes donnent des cours de lecture labiale et sur les stratégies d’adaptation depuis de nombreuses années. La page Web de l’AMEC (www.chha.ca) proposent certains de ces cours sous la rubrique « Publications ». Jetez-y un coup d’oeil.

Il n’y a pas non plus de limite d’âge pour profiter de la rééducation auditive. Lily Bernstein, de Montréal, m’a récemment écrit pour me dire qu’à 85 ans, sur recommandation de son audiologiste, elle commencé à utiliser un appareil auditif dans son oreille droite pour augmenter sa capacité auditive défaillante dans son oreille gauche, dans laquelle elle utilise un appareil auditif depuis 40 ans. Elle n’avait jamais utilisé d’appareils dans son oreille droite parce qu’ils ne reproduisaient qu’un langage déformé. De son propre chef, elle a entrepris une formation auditive et a appris à identifier les sons de divers dispositifs mécaniques chez elle et elle parvient à mieux décoder le langage. Un merveilleux réapprentissage du cerveau.

En ce qui me concerne, avec mon implant cochléaire, je continue de travailler au réapprentissage auditif de la musique et j’ai acheté plusieurs CD de « succès souvenirs » par Frank Sinatra, Bing Crosby et Perry Como. Je les fait jouer dans la voiture et j’essaye de comprendre les paroles – j’en connais déjà certaines. À force de répéter l’écoute, un mot ou une phrase auparavant mystérieux devient soudainement compréhensible. Une phrase continue de m’échapper.La chanson est « Jeepers Creepers » et en hommage à ces merveilleux « peepers », Bing chante « How’dja get the lead out? » Quant à Der Bingle, il n’a jamais été un chanteur à l’élocution claire, mais ce fut un défirréfutable. Je l’avoue… j’ai téléchargé la chanson sur Internet. Il dit, « How’d they get so lit up? » (Comment ont-ils fait pour être si pétillants?). Parfois, il y a une limite à la plasticité cérébrale.

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